Botchan de Natsumé Sôseki

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Katsushika Hokusai

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« Pour tout héritage, j’ai reçu une nature impulsive et risque-tout qui me vaut depuis ma petite enfance de perpétuelles mésaventures.

J’étais encore écolier quand j’ai sauté du premier étage de mon école. J’en ai perdu l’usage de mes jambes une bonne semaine. Je peux m’interroger sur le motif de cette action insane.

Mais non, il n’y a aucune raison sérieuse à cela. Comme je passais la tête par la fenêtre du nouveau bâtiment, l’un de mes condisciples m’avait apostrophé : « Eh… tu te vantes, mais tu ne serais pas capable de sauter d’ici… Poltron, va! »  Il me raillait. ».

Extrait :

Allongé dans ma chambre, je réfléchis à l’usage possible de ces six cents yens. Me lancer dans le commerce, c’était pour moi sans intérêt et j’étais certain d’échouer, d’ailleurs, avec cette si petite somme, il ne me fallait guère espérer faire prospérer un commerce digne de ce nom. Si je me lançai néanmoins dans cette entreprise, je ne pourrais franchement pas faire bonne figure auprès des gens — étant donné mes études inachevées — et je me serais finalement conduit à l’échec. D’un autre côté puisque ces questions de capital étaient indifférentes pour moi, pourquoi ne pas me servir de cette somme comme frais d’études ? En divisant six cents yens en trois, cela me faisait deux cents yens par an et j’aurais ainsi la possibilité de poursuivre des études pendant trois années. Si je travaillais dur pendant trois ans, je devrais bien aboutir à quelque chose. Je me mis alors à délibérer pour savoir quelle école choisir mais depuis toujours les études m’ennuient. Tout spécialement ce qui touche aux langues ou à la littérature, là, vraiment, ce n’est pas mon rayon. Par exemple ce genre moderne qu’on appelle la nouvelle poésie — en vingt lignes ! je n’ai jamais réussi à en comprendre le premier mot. Je réfléchis alors que puisque je n’aimais rien tout m’était par conséquent également indifférent… A ce moment je passai par hasard devant l’Ecole de physique : une annonce pour un recrutement d’étudiants était placardée. C’était un signe du destin, pensai-je ; je réclamai les formulaires d’admission et m’inscrivis immédiatement. Lorsque j’y resonge à présent, cet acte m’apparaît comme une bévue due à mon irréflexion congénitale.

Extrait 2 :

Mon déjeuner terminé, je ne traînai pas pour écrire à Kiyo. Comme mon style est mauvais, que ma connaissance des caractères chinois est limitée, je déteste écrire des lettres. En outre, je n’ai personne à qui écrire. Mais Kiyo se faisait probablement du souci ; J’aurais été ennuyé qu’elle s’imaginât que le bateau avait fait naufrage, que j’étais peut-être mort et je fis de gros efforts pour écrire longuement. Voilà ce que je lui écrivis

« Je suis arrivé hier. L’endroit est sans intérêt. Je loge dans une chambre de quinze tatamis. J’ai donné cinq yens de pourboire à l’aubergiste. La patronne se courbe au point que sa tête touche le sol. La nuit dernière je n’ai pas bien dormi. J’ai rêvé de toi, je te voyais manger même les feuilles de bambous des sasaamés. Je reviendrais l’été prochain. Aujourd’hui je suis allé à l’école, et j’ai donné des surnoms à tout le monde. Le directeur, c’est le Blaireau, Le sous-directeur : Chemise-Rouge, le professeur d’anglais : Courge-Verte, celui de mathématiques : Porc-Epic, celui de dessin : le Bouffon. Je t’écrirai encore d’autres choses plus tard. Au revoir. »

Mon avis :

L’histoire de ce jeune professeur venant de Tôkyô et qui débarque dans un collège de province est un vrai régal.

Notre Botchan doté d’un caractère candide et vif, découvre la jalousie et les petites bassesses de ses collègues à qui il donne des surnoms caustiques. Il doit également faire face aux moqueries et blagues de ses élèves, comme quand ils introduisent des sauterelles dans son lit, scène qui m’a beaucoup fait rire d’ailleurs.

Après quelques déboires, notre grand naif va en tirer quelques bonnes leçons sur la vie, donnera sa démission et retournera à Tôkyô pour y retrouver Kiyo la servante de la famille qui l’a aimé et entouré à la mort de ses parents.

Etrange univers où fréquenter les boutiques de nouilles ou de boulettes de riz sont préjudiciable à la discipline alors que fréquenter une geisha est une récréation spirituelle, Botchan est un roman d’apprentissage très connu au Japon et  lu par tous les élèves japonais.

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